L’hôtel des Alpes a été pendant une demi-siècle un des fleurons de l’hôtellerie divonnaise. Il donnait sur la grande rue, en plein centre de Divonne. Il était superbement orienté et doté d’une vue très large sur la chaîne des Alpes. Il disposait d’un vaste parc, idéal pour les curistes et les touristes qui avaient besoin de repos et de calme.
Robert et Olympe Panissod se marièrent en 1919. Voyant que la station thermale se développait, ils aménagèrent des chambres à louer dans la ferme familiale qui donnait sur la grande rue. Olympe servait les petits déjeuners et les clients prenaient leurs repas en face, à l’Ecu de France, restaurant gastronomique réputé.
On voit ici la Rue Centrale (la Grande rue) vers 1900. A gauche le restaurant de l’Ecu de France (le platane existe toujours!) et en face, les fascines avec… le tas de fumier à l’entrée de la propriété agricole que Robert et Olympe ont transformée en pension meublée vers 1920. Le succès les encouragea à persévérer dans l’hôtellerie. Ils recyclèrent complètement la propriété et créèrent en 1926 la Pension des Alpes (« Confort moderne – Eau courante chaude et froide – Garages – Parc de 25.000 mètres carrés – Panorama des Alpes »).
Or, à la même époque, les gérants de la Société des Bains envisageaient de détruire la Villa Vidart, devenue vétuste, pour construire un nouvel hôtel répondant aux normes modernes de confort (ce sera l’Hôtel du Golf, actuel Grand Hôtel du Domaine de Divonne). Les médecins thermaux étaient inquiets. Où leurs curistes allaient-ils loger? Ils demandèrent à la famille Panissod d’agrandir sa pension. Ce qui fut fait. En 1930, la Pension des Alpes se métamorphosa en un bel Hôtel de 60 chambres.
1939. Le 3 septembre, déclaration de guerre. L’hôtel des Alpes fut réquisitionné, d’abord par la troupe française qui y passa l’hiver, puis, en juin 1940, par une troupe bavaroise, puis par une Compagnie de jeunes recrues allemandes, commandée par le capitaine Jahn qui fit tomber le mur de séparation entre l’hôtel des Alpes et l’hôtel des Etrangers. Les troupes allemandes partirent le 21 août 1944, laissant l’hôtel en bon état et même… la cave pleine! Après leur départ, l’hôtel fut réquisitionné pour héberger le Comité d’Accueil Féminin qui assurait l’accueil des prisonniers et des déportés soignés à l’hôtel du Golf. Il hébergea aussi une Compagnie de FFI (Forces Françaises de l’Intérieur).
L’hôtel rouvrit en 1946 et accueillit alors une nouvelle clientèle, les familles aisées de Pieds-Noirs qui avaient fréquenté les stations thermales de Vichy et Plombières avant 1940 et, ces stations ayant souffert de la guerre, choisirent Divonne… jusqu’à la guerre d’Algérie.
L’hôtel des Alpes resta ouvert toute l’année jusqu’en 1956. A partir de 1957, il n’ouvrit que des Rameaux à la Toussaint parce que les charges étaient devenues trop lourdes en hiver. Peu à peu, la clientèle évolua, avec d’autres exigences. Il fallut moderniser. En 1964, on ajouta à l’hôtel une aile de 20 chambres. Il fut homologué 3 étoiles.
Après les Trente Glorieuses, arrivèrent des temps difficiles. Le coût de la vie augmentait mais le prix des chambres restait bloqué. La famille Panissod n’avait plus les moyens d’investir dans des aménagements. Elle vendit en 1983 la propriété à un promoteur avec la condition qu’il construise un hôtel 3* à côté des appartements. L’hôtel des Alpes fut démoli, mais pendant plusieurs années on ne voyait rien se construire. Les passants considéraient avec tristesse les palissades qui bordaient la Grande Rue. Tant de va et vient, tant d’animation… puis soudain, plus rien! Quel vide! Finalement, le projet immobilier fut repris par un autre promoteur et l’ensemble Divonne-Centre sortit de terre en 1988, appartements et commerces groupés autour d’un joli patio où chante une fontaine. La Grande rue retrouva la vie!